Le monde d’après…

Mon coeur saigne. Ma tête est sur le point d’exploser en réaction aux informations qui m’arrivent actuellement et réveillent en moi un malaise profond.  Je suis partagée entre la colère et la tristesse face aux derniers actes racistes perpétrés aux Etats Unis.

La couleur de ma peau, ma religion ou mon sexe ne devraient pas mettre ma vie en danger. Un homme ou une femme raciste a le droit de ne pas m’aimer, mais il ne devrait pas avoir le droit de porter atteinte à mon intégrité physique. La loi devrait être automatiquement de mon côté. Nous ne devrions pas avoir besoin d’un soulèvement mondial au travers de manifestations pour que des assassins soient arrêtés et jugés pour leur crime.

Ce  problème est loin d’être l’apanage des Etats Unis. Il est mondial : il touche l’Asie, l’Europe, l’Amérique et malheureusement même l’Afrique. Il me touche plus particulièrement car il est présent en France (où je vis actuellement) et dans de nombreux pays d’Afrique dont je suis originaire. Chaque jour des enfants noirs voient leurs parents, leurs amis, leurs semblables malmenés, discriminés, voire assassinés uniquement parce qu’ils n’ont pas la « bonne » couleur de peau.

Je me définis en premier comme étant une femme noire vivant dans un monde complexe. Et être noir dans ce monde est considéré comme une tare. Etre une femme noire est un fardeau supplémentaire. Or cela devrait être l’extrême opposé. Notre différence est notre force, la richesse de ce monde. Ensemble nous pouvons relever tous les défis qui se présenteront à nous. Ceux qui nous haïssent devrait prendre conscience qu’ils s’affaiblissent en faisant cela.

De nombreuses personnes sont encore dans le déni de ce que nous vivons nous les noirs du monde entier. Cette situation est blessante et choquante. 

Cela fait 23 ans que je vis en France : 

  • Je n’ai jamais été arrêtée par la police pour un quelconque contrôle d’identité sur la route, dans les rues ou dans les transports en commun
  • Je n’ai jamais subi de violences policières
  • Je n’ai jamais été arrêtée injustement par les douanes françaises aux frontières
  • J’ai rarement été victime d’injures racistes

Je me demande chaque jour ce qui est à l’origine de ce traitement particulier et dans le même temps, je profite de ma chance.

Mais ce n’est pas parce que je ne vis pas une situation qu’elle n’existe pas. Je suis bien consciente que ce monde est gangréné par le racisme et la xénophobie. Même si j’ai été très peu souvent victime d’actes ou de propos racistes, mon empathie me permet de comprendre la colère ressentie par mes  frères et soeurs.

Ce qui est également choquant pour moi est le fait que peu d’intellectuels noirs sont invités sur les plateaux de télévision ou de radio en France pour discuter de ces problématiques. Comme si nous n’étions pas vu comme assez intelligent, éduqué, pragmatique pour donner notre avis. Nous voient-ils comme une menace, venant défier l’ordre établi ?

Je suis tout à fait consciente que même si ce problème est mondial, il se décline différemment dans chaque pays touché. En effet, ce que vit un noir américain ne peut être comparé à ce que vit un noir en France. L’histoire et la culture de ces deux pays sont profondément différents.  Mais la finalité demeure identique : la souffrance d’hommes et de femmes noires. 

Je n’ai pas la solution aux difficultés que nous vivons actuellement et qui durent depuis des siècles maintenant. Et je sais que mes mots ne seront pas suffisants. Je sais uniquement que nous devons nous élever économiquement pour pouvoir peser à la table des nations et faire entendre nos voix plus clairement. Sans cela nous ne serons jamais pris au sérieux. Nous ne devons pas supplier notre oppresseur, mais lui arracher notre liberté. Il nous faut également construire une économie noire florissante, occuper des postes à responsabilité, bâtir une communauté forte, nous entraider. De cette manière il sera de plus en plus difficile de nous manquer de respect et les attaques que nous subirons ne resterons pas impunies.

Je veux également croire que l’intelligence collective permettra de faire éclore des solutions propres aux contextes historiques, culturels et sociaux de chaque pays touché par le racisme. Que l’éducation jouera enfin son rôle et brisera ces inepties. 

La pandémie du COVID-19 a fait naître une volonté de construire un nouveau monde. De changer les choses, d’améliorer notre quotidien.  Il est temps de s’attaquer réellement à ce problème. Et de faire enfin respecter nos droits. J’espère que ce réveil des consciences, les manifestations qui agitent actuellement notre monde, seront le « wake up call », le déclic qui nous permettra enfin de mettre en marche ce changement tant attendu par nos pères. Que nos alliés nous aideront à mener ce digne combat. Car comme l’a si bien dit « Edmun Burke » : la seule chose qui permettra au mal de triompher est l’inaction des hommes de bien.

Pour finir je citerai « Martin Luther King » : I have a dream that my children will one day live in a nation where they will not be judged by the colour of their skin but by the content of their character.

Je veux croire que ce jour viendra. Je ne le verrai peut être pas de mon vivant, mais il viendra éclairer mes semblables et ma possible descendance (n’étant pas encore mère au moment où j’écris ces mots). Je m’autorise à rêver, à croire que tout est possible. Que le monde de demain, ce monde nouveau dont nous avons tous rêvé durant cette période de confinement, confrontés à nous même verra enfin le jour. Et que nous jouirons de cette égalité tant recherchée. 

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